Voici un livre vivifiant et remarquable en cette période de couvre feu et autre confinement. Un baume pour les villageois volontaires dont je suis.
Il fait prendre conscience de l’impérieuses nécessité de réapprendre à consommer. De reconstituer des bases et travail proches de nous et de reprendre les rênes de notre pays en matière de fabrication de l’essentiel à nos existences .
Sous nos yeux en un demi siècle la France s’est déglinguée, défigurée et appauvrie en beaucoup de domaines . Même en matière culturelle car il semble que nous ne partagions pas les mêmes valeurs, même en ce domaine.
Ce livre est à offrir aux [1]nombreux conseillés municipaux, maires et députés de nos régions, Village. Michel Pateau [2] leur donnera du grain à moudre.[3]
Le journaliste d’un quotidien de province trouve une maison ancienne dans un village des environs de la ville, assez importante, où il travaille. Depuis son enfance il est “urbain“ , avec sa suite, un mariage complice et heureux et deux gamins en âge de fréquenter l’école primaire.
Une vitesse de croisière qui conduit le couple à regarder les verts horizons et à assouvir désirs d’évasion et de détente . Les agriculteurs, les artisans et paysans, les ouvriers municipaux sentent et vivent de la terre. Les urbains y débarquent et doivent faire connaissance . Il y a une cinquantaine d’années le rapprochement s’accomplissait facilement, souvent les nouveaux amis et relations s’harmonisaient sans heurt ; les paysans prenant aussi un peu des couleurs de la ville. Vivre avec le village et les gens du village, un beau pari que ceux des cités et station d’eaux et de cure comme du bord de mer ont connu bien avant. Michel et les siens nouent de véritables et solides amitiés. Même si au cours de la période probatoire, un à deux ans en général on les a un peu “zieuté“ en étranger (estranger du dehors)[4] !
Mais hélas il y eut les “Tsunami “ déchainés par certains urbains cent et mille fois ! Ceux qui “Ont eu “ des idées pour moderniser les campagnes. S’y installer en voulant garder toutes les pratiques de la ville. Le “gars “ou la “nana“ en mal de “promotion“. Cela commence par l’achat d’un terrain sur lequel on fait bâtir une maison “nouveau style“[5] et ensuite , par une suite d’actions visant à prendre rang dans les municipalités, puis à les diriger au mépris comme à la méconnaissance des spécificités des gens et des lieux. Et le tableau noir s’est rempli…abandon de beaucoup d’habitudes et cultures, construction de super marchés inutiles. Fermeture des commerces de proximité, des services publics etc.
Michel Pateau voit Son Village d’adoption se détériorer, se défigurer, se dégrader au point de n’être plus qu’une suite de constructions prétentieuses et sans style. Il a vu des hommes désespérés de perdre leur Mairie parce qu’ils ne “réformaient pas assez vite“ au sens propre-restauration du bâtiment par des travaux imbéciles défigurant le village, abattage d’arbres centenaires etc. Il s’est retrouvé comme un étranger chez lui avec les anciens… du village.
Il y a dans ce livre un plaidoyer discret et intelligent pour que désormais on cesse de faire n’importe quoi et presque toujours d’irréparables choses sous prétexte “d’avancer“.
De belles pages au nom de la beauté simple de notre France si variée et des évocations et descriptions de gens de caractères très divers et imagés qui nous rappellent les poètes de villages, les agriculteurs ingénieux et travailleurs ,les jardiniers municipaux lyriques et bavards, les facteurs rigolos et les instituteurs heureux et respectés, les accortes restauratrices et commerçants prospères et les vendeurs de merveilles. Et même les poivrots. Bref Michel Pateau nous rappelle qu’un Bourg, un village, une petite ville c’est une âme commune, un cœur qui bat non loin de sa rivière ou de sa forêt.
Ce ne sera jamais un rassemblement de gens refusant de prendre racine, qui se moquent des souvenirs et qui ont besoin que l’on vienne planter leurs géraniums . Des gens qui croient avoir l’utilité d’une piscine lorsqu’il ne savent pas nager , à côté d’un champs de blé et d’une forêt dont il pourraient écouter les arbres et qu'ils ne regardent même pas !
Heureusement il en reste encore de ces villages au fin fond de routes difficiles à rouler. Des places sans réverbères[6] où les marchands forains et les cultivateurs viennent vendre dès potron minet. Et je l’espère, il y aura bientôt, à nouveau, des vendeurs en camionnettes qui reprendront le métier de colporteur et passeront par chez nous comme autrefois.
Très charmantes et évocatrices illustrations de Jacques Boutry[7]
Amalthée
Editions Saint Léger Feuillage
[1] (trop) disent certains
[2] Voir l’article sur son livre L’Allée des Marronniers dans le Commercial du Gard et sur le site amaltheehc-ecrivain.info
[3] Il pourront aussi réapprendre à lire pour certains !
[4] très méridional
[5] Il y a eu et il y a et il y aura autant de nouveau style à “hurler“ que l’on aura de cabinet d’architecte ! Sans commentaire
[6] Inutilement allumés la nuit Que d’énergie gaspillée !
[7] l’auteur de Bain forcé