Magdalena Kozena
Ravel,Dvojak,Mahler
Désirs,rêves et passions d'une autre atmosphère
Nous vivons une curieuse époque qui voit des cantatrice de langue étrangère se passionner pour notre répertoire.
Ainsi Magdalena Kozena qui aujourd'hui nous présente une version qui doit faire date parmi les interprétation de Ravel.
La soprano Magdalena Kozena apparut dans le ciel de la musique baroque il y a une vingtaine d'années.Venue des monts de Bohème(Brno) elle possède et maitrise un art vocal d'une haute qualité qui se distingue par la parfaite musicaliqté quasi instrumentale de la vocalité .
Généreuse mezzo soprano ,remarquée aux instances du Printemps de Prague dès son plus jeune âge elle s'empara très vite des scènes allemandes,italiennes et autrichiennes pour se révéler une cantatrice au talent versatile et splendide,dont la voix à l'ambitus étendu et au timbre soyeux n'ont d'égal qu'une diction en quatre langues sans reproche. Même les français purent admirer la classe et l'élégance de style et de phrasé de cette interprète car , elle étonna tout d'abord les spectateurs de la salle Favard [1]à Paris en campant une Mélisande éperdue et incomparable d'émotion réelle et touchante. Une mise en scène de Martinoty pour une fois sensée permit à ceux qui savent ce que chanter doit être de se souvenir qu'une voix en aucun cas ne peut être petite pour chanter un chef d'oeuvre. La représentation fut donnée à la télévision.La saison 2010-2011 la vit dans une production de l'Orfée et Eurydice de Gluck à l'opéra Bastille absolument magnifique...Qui ne défraya pas la chronique car les français n'aime rien tant que le tapage!
Après une période englobant la fin de ses études en Tchécoslovaquie et ses premières années d'une carrière de soprano classique,elle nous enchanta d'un premier disque avec des arias de Bach qui nous firent vite comprendre que nous avions rencontré une diva de caractère .
Quelques temps plus tard son union avec Simon Rattle, chef de la très célèbre Philharmonie de Berlin ,nous la présenta à plusieurs reprises dans des concerts et opéra d'une dimension incomparable
Si elle chantait Bach et ses contemporains elle sut aussi exprimer avec la même foi et la même envergure le chant orné , bel cantiste ,les oeuvres lyriques de concert devenant peu à peu l'une des grandes de ces dernières années.Son art du legato,la justesse de ses attaques comme la rondeur et le fini de toute prosodie dramatique lui permet de réussir dans les classiques comme de Gluck et surtout Mozart et désormais depuis ce printemps dans Carmen de Bizet;disque qui doit sortir sous peu avec Simon Rattle et l'orchestre philharmonique de Berlin.
C'est dans cette même distribution que le présent coffret nous attire et d'emblée se place en tête de liste des sorties de l'année.
Tout d'abord Shéhérazade ensemble de trois mélodies sur des poèmes de Arthur Justin Léon Leclère connu sous le pseudonyme hautement wagnérien de Tristan Klingsor. Asie,La flûte Enchantée et l'Indifférent ,ces chants orchestrés de Maurice Ravel ,datent de 1903 et revêtent tout le mystère de l'inspiration comme de l'attente du poète de voir ses rêves se réaliser par son art.La musique écrite par Ravel est si proche du langage du poète que l'on oublie les mots et se laisse glisser au coeur d'un monde encore à découvrir.
La prononciation de Magdalena Kozena rend à ses oeuvres leurs parfums évanouis et leur transcendance irréelle.Depuis Régine Crespin, aucune cantatrice n'est parvenue à élever ces textes à leur frissonnant et étourdissant firmament. Il faut dire que la culture des chanteuses françaises est souvent trop limitée pour atteindre de tels chefs d'oeuvres!
Même délicatesse et même force poétique pour les Rückert Lieder de Gustav Mahler.Ici nous sommes en poésie de langue allemande et les mots se fondent à la musique ou peut-être l'inverse...L'essentiel étant le sentiment de pouvoir se lover dans cette atmosphère douce,mélancolique et irréversible d'une attente dont on ne sait vers où elle nous conduit pour notre plus intime bonheur de l'instant.
Et l'enchantement se prolonge par les Chants bibliques de Dvorak chantés dans la langue originale .Le compositeur se trouve alors aux USA et ces réminiscences lui viennent au coeur et à l'âme à la suite du décès de son ami Hans Von Bulow le chef d'orchestre de ses amis et défenseur de la musique de Wagner.
L'orchestre de Berlin et Simon Rattle battent d'une même ferveur,d(une même délicatesse et s'emporte de la même passion pour ces mélodies et ces chants qu'une heureuse et intelligente inspiration réunit ici.
Un disque de chevet absolument superbe.
Magdalena Kozena
Long and Longing
Chez Deutsche Grammophon
Amalthée