Littérature et musique
Abbesses
Par Hélène Clerc-Murgier
Chez Actes Sud
La Claveciniste Hélène Clerc Murgier , se passionne pour l’histoire de Paris et ses mystères, comme elle découvre des partitions musicales oubliées et non jouées, à la Bibliothèque Nationale de France et ailleurs. Elle est également auteur de scénarios pour l’opéra comique.
Élève de Gustav Leonhardt[1], elle fit une grande part de ses études instrumentales en Hollande. Rentrée en France elle s’attacha, comme soliste, à faire valoir notre répertoire français en parallèle au répertoire classique.
Puis elle s’engage dans la direction, la formation et la fondation d’un ensemble basé à Reims : Les Monts du Rueils. Elle a travaillé avec autant d’orchestres baroques et de chœurs que nous pouvons en connaître ! Son talent d’interprète, sa curiosité sont à la mesure d’un brio et d’une inspiration toujours originale.
Je ne vous parlerais pas aujourd’hui de ses disques, Compact ou vidéo, car je la découvre au travers d’un livre qui paru en 2013 chez Actes Sud. Abbesses un Roman policier historique.
J’avoue ne pas l’avoir demandé chez Actes sud à sa sortie. Et j’aurais dû, car j’ai risqué de le manquer !
Cependant étant un peu étiquetée comme aimant le policier musicaux[2], une attachée de presse a pensé à moi. Merci.
Car ce roman de Hélène Clerc-Murgier, avec son titre raide et sa prose d’un style fougueux et sincère, est une vraie réussite.
Il vous tient en haleine dès l’entrée de jeu de massacre que se révèle la vie journalière autour et à l’intérieur du Grand Châtelet [3]de Paris au début du XVIIème siècle.
Alors, la reine mère Marie de Médicis veuve de Henri IV et mère de Louis XIII, est en route pour Blois. Un exil qu’elle vécut plutôt aigrement et peu agréable et qui provoqua des remous.
Jacques Chevassut est Lieutenant Criminel du Grand Châtelet, flanqué d’adjoints dont Pierre Boivin qui va disparaître mystérieusement dès les premières heures et d’un personnel à ses ordres nombreux, dont un homme que sans doute il ne regarde pas suffisamment de près. Ce Lieutenant Criminel est le personnage incontournable de Paris. Mais il est exposé comme toute haute Tête de la société. Et l’angoisse qui nous étreint n’est pas mince.
L’endroit du Grand Châtelet (fin de la Rue Saint Denis, était l’un des plus fétides de Paris ; sinon le pire. Les rues avoisinantes parfois infréquentables ! Les lavandières pour la plupart remarquables travailleuses , voisinant avec les ribaudes et les marchands de poisson contraints à la prudence non loin de leur lieu de travail, mais exposés à la carcaille. Bref les descriptions sont réalistes et savoureuses pour le lecteur qui ne s’ennuie pas du dépaysement total au regard de ce que l’on connaît du Paris d’aujourd’hui.
Et surtout! Gardons présent à l’esprit que l’on envoyait à Montfaucon très souvent des innocents ayant avoué n’importe quoi ! Car la torture était chose courante et même habituelle dans tous les cas. Les procès étaient publics, ce qui n’arrangeaient pas les choses.
Un peu plus loin dans l’espace, la courtoisie et les Belles lettres ne manquaient nullement puisque une soirée à l’Hôtel de Rambouillet prend place dans le courant des évènements de ce roman.
Ce Paris cloisonné ne manque pas de sel ! Ni de sucre ! Pas plus que d’Auberges mal ou bien fréquentées où l’on récupère certains renseignements. [4]Et avec ses Hôtels nobles et ses Maisons de maître, ses palais auxquels le menu fretin n’a pas accès ; Paris prit souvent l’allure d’une ville magnifique.
N’oublions pas que le roi est au Louvre et que depuis Philippe Auguste il ne cesse de grandir.
Mais Paris comptait aussi de nombreuses communautés et maisons religieuses dont l’abbaye de Montmartre et ses possessions terriennes, son tribunal et ses abbesses. Ici sont les limites du monde du Paris normal …Et l’on se doit d’être circonspect et prudent avec ces dames très puissantes.
Enfin vous aurez une légère idée de ce roman lorsque vous prendrez conscience que Les Rose Croix fait leur apparition vers ces années là. Venus d’Allemagne, leur réputation comme leurs agissements sont critiquables à bien des égards.
Comment Jacques Chevassut parti d’une enquête qu’il a ordonné à la suite d’un assassinat terrible suivit d’autres du même style, parviendra-t-il à ne pas passer à la trappe vengeresse ? On en doute parfois. En aura-t-il la possibilité ?
Grâce à ses relations avec un mathématicien ami de Descartes ? Ou en devinant dans le regard de l’Alchimiste Gonin, le plus célèbre de son temps qu’il suit une voie plutôt positive ? Ce qui l’encourage.
Il n’en est pas moins obligé de chercher du côté de Montmartre ! Là où un ancien Temple de Mercure élevé par les romains signifie encore pour quelques mystérieuses personés et quelques mystérieux personnages doubles, bien des mystères à découvrir.
Mais au fait n’y a-t-il pas également une histoire de trésor ?
Rendez-vous donc à la lecture de ce passionnant roman De Hélène Clerc-Murgier, Abbesses paru chez Actes Sud.
Amalthée
[1] Disparu en 2012
[2] Voir mes deux articles sur Wagner (Le maitre chanteur de Minsk et Schumann
De Morlay Torgov
[3] Forteresse de protection de Paris entourée de fossés, construite par Louis VI (Le gros) Siège de la police elle abritait aussi les cachots et les morgues de la capitale.
[4] La police a-t-elle changé ?